Le refuge

La chasse à la sorcière a duré plusieurs semaines

Mon frère, en remontant l'Ubangi

A fini par retrouver sa pétroleuse près du vieux dolmen

Dans la forêt des ronces où l'épine et le chardon emmêlés

Ne permettent pas le passage

Ce sont des voix d'anges qui sont parvenues jusqu'à lui

Et qu'il a suivies, comme envoûté par le chant des sirènes

Saine et sauve, la sorcière était rentrée dans sa case

Aux coins obscurs où, loin des foules inquisitrices

Elle aimait couver ses pensées et loger ses rêves

En filant la quenouille

Dans son refuge, elle recueillait les enfants Pygmées

Dont les parents avaient disparu dans les flammes

Des gigantesques feux de déboisement

Elle avait monté une chorale avec eux

Il y a beaucoup d'animaux, aussi, qui passaient sur le site

Pour se rafraîchir dans les eaux de la rivière

La disparition progressive du couvert forestier

Déglinguait complètement la météo

Le mercure n'arrêtait pas d'grimper

Et y faisait parfois une chaleur à crever

À la maison, heureusement, on avait la clim'

Sinon, je sais pas comment j'aurais fait

J'ai tellement d'mal à supporter la canicule

Mon frère avait complètement délaissé ses pliages

Pour se consacrer à l'installation

De rampes de brumisation dans les sous-bois

Ainsi, sous les caresses des fines gouttelettes

Portées par les airs brûlants

Philippe et la sorcière coulaient des jours heureux

Avec leur cœur d'orphelins

Mon faux jumeau avait trouvé sa nouvelle moitié

Sauf que, cette fois, c'est pas que lui qui commandait